NON à l’initiative populaire « Pour des primes plus basses. Frein aux coûts dans le système de santé (initiative pour un frein aux coûts) » le 09.06.2024
Depuis des années, les primes augmentent plus que les coûts de la santé et les revenus. Parallèlement, de nombreux cantons se défaussent de leur responsabilité de les réduire. Résultat : pour une bonne partie de la population – également de larges pans des classes moyennes – les primes grèvent lourdement le budget. Et les réductions cantonales ne suffisent pas comme en témoignent les quelque 400’000 personnes qui sont en misent en poursuite chaque année par les caisses-maladie1.
L’initiative populaire déposée par les syndicats et le PS veut changer la donne : elle demande que les primes versées par un ménage ne dépassent plus 10% de son revenu disponible. Pour y parvenir, les contributions fédérales aux réductions de prime doivent également être relevées. Le Parlement a adopté un contre-projet indirect à cette initiative, obligeant les cantons à verser davantage de réductions, au cas où l’initiative serait rejetée. Or, ce contre-projet est nettement insuffisant pour décharger réellement la population et neutraliser l’augmentation incessante des primes. C’est pourquoi les VERT-E-S recommandent d’accepter l’initiative d’allègement des primes.
L’initiative pour un frein aux coûts du Centre prétend également diminuer la charge des primes. Elle veut que les coûts assumés par l’assurance-maladie obligatoire n’augmentent pas plus que l’économie nationale et les salaires. Faute de quoi Confédération et cantons doivent prendre des mesures pour réduire les coûts, assorties d’une entrée en vigueur l’année suivante. Si l’idée paraît à première vue sympathique, à y regarder de plus près, elle porte une atteinte inexorable à notre système sanitaire. Le problème principal n’est pas que les coûts de notre système sanitaire augmentent, mais que ceux-ci sont financés de manière antisociale au moyen des primes par tête. Or, l’initiative pour un frein aux coûts ne s’y attaque pas. Mais elle va accroître encore la pression sur le personnel soignant, et donc les abandons professionnels. Pour la population, ce frein aux coûts reviendrait à démanteler, voire au pire des cas, à rationner les prestations médicalement requises dans l’assurance de base. Cette initiative est par conséquent un grand pas en direction d’une médecine à 2 vitesses.
De plus, coupler les coûts de la santé à l’économie est fondamentalement erroné. Notre système sanitaire doit répondre aux besoins de la patientèle et non à la conjoncture, ceci d’autant plus que les gens tombent plus malades lors des crises économiques : la pauvreté rend malade ! De surcroît, l’initiative réduirait considérablement la marge de manœuvre lorsque sont en hausse des coûts nécessaires ou souhaitables, p.ex. en fonction de l’évolution démographique, des progrès médicaux ou à cause d’événements imprévisibles, tels qu’une pandémie. Au reste, le Parlement a également adopté un contre-projet indirect à l’initiative, qui assigne des objectifs de coûts et de qualité à notre système de santé, ce qui met déjà en œuvre une de ses revendications-clés.
Pour les VERT-E-S, il existe différents domaines sanitaires où l’on pourrait économiser et donc alléger les primes. Le plus efficace serait de consacrer davantage de fonds à la promotion de la santé et à la prévention, ce qui éviterait des maladies au lieu de les soigner. De même, il faut financer la santé de manière plus sociale : non seulement en réduisant davantage les primes, mais également en remplaçant le système antisocial de primes par tête par celui des primes liées au revenu et à la fortune. En outre, les VERT-E-S veulent changer de paradigme, au lieu de se contenter de petites retouches politiques.
Oui à un allègement social des primes
La hausse des primes d’assurance-maladie fait partie, à côté du réchauffement climatique, des principales préoccupations de la population. Pas étonnant, puisqu’aussi bien les émissions globales de CO2 et que les primes ont pris l’ascenseur au cours de ces 3 dernières décennies. Les primes ont plus que doublé ces 25 dernières années et augmenté plus rapidement que les salaires, les rentes ou les réductions de prime. Conséquences ? Pour de nombreuses personnes, et notamment pour les classes moyennes, les primes grèvent lourdement le budget : quelque 400’000 d’entre elles sont même mises en poursuite par les caisses-maladie chaque année !
Or, ni le Conseil fédéral, ni le Parlement ni les cantons ne bougent. Au lieu d’instaurer des primes en fonction du revenu et de la fortune ou d’augmenter le financement étatique de la santé, une part toujours plus grande des coûts sont financés via la prime antisociale par tête. Et, de plus en plus de cantons se défaussent de leur responsabilité de réduire davantage les primes. L’acceptation de l’initiative d’allègement des primes déchargerait enfin les ménages : à l’avenir, les primes d’assurance-maladie ne devraient pas dépasser 10% de leur budget, comme l’avait d’ailleurs promis le Conseil fédéral en instaurant l’assurance-maladie obligatoire.
Non au démantèlement antisocial des prestation, non à davantage de pression sur le personnel soignant
L’initiative pour un frein aux coûts veut certes ralentir ces derniers, mais elle ne dit pas comment ni où épargner. Il est cependant déjà clair qu’elle fera encore davantage pression sur le personnel soignant. En effet, les coûts sanitaires sont principalement dus au personnel. Dans les hôpitaux par exemple, le personnel représente deux tiers des frais d’exploitation2. Si l’on veut économiser ici – en supprimant du personnel ou en péjorant les salaires ou les conditions de travail, davantage de professionnel-le-s quitteront le métier, ce qui menace en fin de compte la couverture sanitaire.
Or, l’initiative pour un frein aux coûts serait fatale non seulement au personnel soignant, mais également à la population. Même le Conseil fédéral redoute que l’on ne pratique plus des traitements médicaux pourtant requis et économiquement pertinents, faute de moyens. Et il serait même envisageable de rationner les prestations ou traitements, parce que l’initiative ne tient pas compte du vieillissement de la population ou des progrès médicaux par exemple. Mais des prestations ne seront plus accessibles à un large pan de la population, si elles ne sont pas remboursées par l’assurance-maladie. On aurait ainsi la chance de recevoir un traitement, si l’on dispose d’une assurance complémentaire coûteuse ou si on peut le payer soi-même : démantèlement des prestations et rationnement de la couverture sanitaire touchent d’abord les personnes pauvres et malades ! L’initiative pour un frein aux coûts propose donc un grand pas en direction d’une médecine à 2 vitesses, qu’il s’agit absolument d’empêcher.
Les retouches politiques ne suffisent plus, changeons de paradigme
Aussi bien l’initiative d’allègement des primes que l’initiative pour un frein aux coûts signalent que le système antisocial des primes par tête, même avec des réductions cantonales a atteint ses limites. Une fois acceptée, l’initiative d’allègement des primes soulagerait la population au moins à court terme. Mais à moyen terme, il faut changer de paradigme pour assurer un financement social de la santé. La Suisse peut se permettre d’avoir une excellente couverture sanitaire, pour autant que son coût soit équitablement réparti. C’est pourquoi les VERT-E-S mettent tout en œuvre pour que les primes antisociales par tête soient remplacées par des primes liées au revenu et à la fortune3. Ces dernières soulageraient durablement une grande partie de la population et notre système sanitaire serait financé – tout comme l’AVS – par l’ensemble de la population en fonction des possibilités économiques de chacun-e.
Afin de réduire les coûts sanitaires, il s’agira, à l’avenir, d’éviter les maladies plutôt que de se focaliser sur leurs traitements, ce qui nécessite une véritable offensive en matière de prévention et de promotion de la santé, p.ex. via une loi sur la santé, comme les VERT-E-S la réclament depuis longtemps4. De même, lutter contre le réchauffement climatique, l’érosion de la biodiversité et les inégalités sociales contribuent à réduire les coûts de la santé, comme le montre notre prise de position : un futur sain dans un environnement sain : priorités Vertes en matière de politique sanitaire. Enfin, des économies potentielles substantielles existent également sur les prix élevés des médicaments, les frais de gestion des caisses-maladie et les salaires élevés des médecins-chef-fe-s, soit les milieux mêmes qui ont déposé l’initiative pour un frein aux coûts, afin d’empêcher des solutions durables.